V
Des vies passent devant toi
pendant que tu passes
des arbres
des souffles
un réseau magnétique
des fils hors réseau
des fulgurances
et des immondices
des dieux solaires et des obscurs
des habités et des inconscients
des pas encore criminels
et des à jamais inoffensifs
qui se croient impuissants
et qui baissent les yeux
devant le monde qui tache
et qui hurle
des rêves passent devant toi
qui ne savent pas
où commence l’illusion
où se termine le ciel
pendant que tu passes.
IV
j’ai habité un large sentier
sur lequel se penchent les ombres
le flanc souple et docile
à l’heure du coucher
j’ai habité une voie romaine
qui garde fiévreuse la sueur
de danseurs inconscients
les torses vêtus du soir
j’ai habité l’instant flexible
d’un temps qui ne se fixe pas
sur une ville en sursis
où la splendeur est la norme
j’ai habité de ne savoir
où demain s’arrête.
III
Je marche dans ton ombre
mais je ne pense pas tout le temps à toi
je ne marche pas tout le temps
sur les pavés de la renaissance
dans des temples bénis
ou des vergers millénaires
des ciels me trempent la face
mon amour
et ce n’est pas de penser à toi
ni à la petite âme qui tend la main
vers celle qui ne l’effleure pas
en attendant sagement
les roues qui voudront bien
l’effacer de ce désastre
il pleut sur moi des pensées errantes
qui semblent appartenir à d’autres
dont les ombres marchent sur moi.
II
Si tu savais le temps qui me traverse
Pendant que je traverse vers toi.
I
Tu ne sais pas qui passe.
Pendant que tu passes
Samira Negrouche
Listen to the original read by the poet:
Samira Negrouche’s poetry is polyvalent. Sometimes it is strongly narrative/dramatic, grounded in Algerian/Kabyle landscape and history, or limning the intricacies of a relationship—erotic, filial, sororal. Sometimes it aspires to the condition of another art—it might be the third instrument in a trio, or choreographic notation for a dance. I think of this sequence as having choreographic aspiration, a dance solo disembodied, while at the same time (as the dance might) reflecting on an essential human need, the motion that keeps bodies and minds alert and alive.
Samira Negrouche was born in Algiers where she still lives. Author of seven poetry collections and several artists’ books, she is a poet and translator and also a doctor, who has privileged her literary projects over the practice of medicine. Prone to multidisciplinary projects, she has frequently collaborated with visual artists and musicians. Recent collaborations include performances Quai 2I1 with violinist Marianne Piketty and theorbist Bruno Helstroffer and Traces with choreographer Fatou Cissé. Her books include A l’ombre de Grenade (Marty, 2003), Le Jazz des oliviers (Le Tell, 2010), Six arbres de fortune autour de ma baignoire (Mazette, 2017), and Quai 2I1 partition à trois axes (Mazette, 2019). A bilingual book-length collection, The Olive-Trees' Jazz and Other poems, translated by Marilyn Hacker, will be published by Pleiades Press in February 2020.
Marilyn Hacker is the author of fourteen books of poems, including Blazons (Carcanet, 2019), A Stranger’s Mirror (Norton, 2015), and an essay collection, Unauthorized Voices (University of Michigan Press, 2010). Other translations of French and Francophone poets include Vénus Khoury-Ghata’s A Handful of Blue Earth (Liverpool University Press, 2017), Emmanuel Moses’ Preludes and Fugues (Oberlin, 2016), and Rachida Madani's Tales of A Severed Head (Yale University Press, 2012). She received the 2010 PEN/Voelcker Award, and the international Argana Prize for Poetry from the Beit as-Sh’ir/House of Poetry in Morocco in 2011. She lives in Paris.
