de L'Ombre-Monde

Roselyne Sibille

Je t'écris de l'autre côté de l'ombre

Je t'écris de l'autre côté de l'ombre
Je t'écris pour ne pas disparaître
pour que les mots me révèlent
pour que tu entendes plus que le vide





Les latitudes s'échappent

Le pluriel a glissé de mes doigts avec les certitudes
Les latitudes s'échappent dans les soubresauts du fleuve

Quand l'ombre se tend vers la fumée
offre-t-elle
          des ailes
               au vide ?





L'ombre gémit

L'ombre s'avance dans le reflet qui fuit
gémit
transparente et fine
à peine en appui
adossée au temps

Comment concevoir l'ombre de la nuit ?


L'ombre ne sait où sont les ponts
cherche son double         et le souffle
répète un cri            gris et dru

L'ombre attend       le hublot


La lune
frappe
sur ma tête





Barbelés dans ta bouche

Barbelés dans ta bouche

Les mots se crispent
cherchent un passage
déchirés
se redressent
écartelés

Les syllabes éparpillées                 égarées        erratiques
se veulent                 accumulent l'impossible
voguent à la dérive d'un monde dont on ne comprend plus la langue


Tu renonces
Tu les avales derrière tes paupières

Des jours et des jours et des phrases échouées


Quelle alchimie a joué dans l'impuissance
pour que sous le marronnier
ton regard ait trouvé
la limpidité des lacs chiliens
la douceur d'une aurore nue après la nuit d'orage ?