Parallaxe mortelle
Chawki Amari
Les deux hommes discutent dans la pièce enfumée. Sur la table sculptée posée au milieu du salon, une pile de photographies. M. prend celle du dessus et la montre à B.
—Regarde celle-ci. Je l’ai prise ce matin. Elle est bonne.
Silencieusement, B. observe l’image un bon moment en tirant sur sa cigarette puis la repose sur la table :
—Tu as raison, elle est bonne. Les trois jeunes qui marchent dans le même sens en file indienne et la vieille femme immobile qui les regarde passer. Le mouvement est éloquent. En plus, avec l’horloge au-dessus des personnages, on dirait un soleil qui illumine la scène. Elle est réussie. Elle en dit long. Toute une histoire.
M. prend la photo :
—Tu vois, là, sur la gauche. Le pied. C’est celui d’un type qui passait. Il gêne un peu. Il faudra peut-être recadrer la photo.
—Peut-être. Mais envoie-la comme ça, ils sauront ce qu’il y a lieu d’en faire. Ce sont eux qui paient.
—Tu as raison. Ce n’est pas mon problème. Ils vont l’acheter de toutes les façons. Avec tout ce qui se passe en Algérie, il n’y a pas beaucoup d’images et ils n’ont pas vraiment le choix. En plus, la photo est bonne.
—B. s’est levé, il est à la fenêtre. Du huitième étage, il domine la ville. Tout en bas, de minuscules passants s’agitent en se marchant sur leurs trajectoires.
—Dis-moi M., dit B. en se retournant brusquement, tu as eu des problèmes pour prendre l’image ?
—Pas vraiment. Dès que je l’ai vue, je j’ai prise et je me suis sauvé en prenant de petites ruelles. Je crois que j’ai été repéré mais c’était déjà trop tard pour eux.
*
Un attroupement dans la rue. Des gens sont agglutinés et, dans la cohue, on entend des cris et des pleurs. La police vient d’arriver, trop tard comme souvent, et tente de disperser les curieux à coups de crosse. Quelqu’un demande :
—Que s’est-il passé ?
Un vieux monsieur, visage triste, explique :
—On a encore pris une image, dit-il en montrant le trou rectangulaire derrière lui. Il y avait une image, là, et ils l’ont prise. C’est la quatrième cette semaine.
—Il y a eu des victimes ?
—Trois jeunes et une vieille sont morts. Un autre a perdu un pied. Il était juste au bord de la photo. Il a eu de la chance.
Une femme est effondrée sur le trottoir. Elle pleure. C’est la mère d’un des trois jeunes, ses mains regardent le ciel :
—Mon fils ! Ils m’ont pris mon fils ! Pourquoi mon Dieu ? Pourquoi mon fils ? Tout ça ne s’arrêtera-t-il jamais ? C’est le deuxième que je perds en un an ! Pourquoi mon Dieu ? Pourquoi moi ? J’ai perdu mon mari pendant la guerre d’indépendance, sommes-nous condamnés à toujours mourir ? Pour accoucher de quoi ?
Des femmes essaient de la calmer. Un homme explique son départ à qui veut l’entendre :
—Il vaut mieux ne pas rester là. Ils sont peut-être encore dans le coin. Ils peuvent en profiter pour prendre une autre image. Ils font souvent ça. La première pour attirer la foule et les forces de l’ordre. La deuxième pour prendre le tout. Ce serait un carnage.
La foule s’est quelque peu dispersée. Deux jeunes concluent vaguement, les mains dans les poches :
—Que fait le pouvoir ? On dirait que ça les arrange.
—C’est le peuple qui paie. Ça ne les inquiète pas. Peut-être même que c’est eux qui font tout ça.
—Ce ne serait pas étonnant. Pays pourri.
L’attentat est clos. En fin d’après-midi, les officiels débarquent sur les lieux pour y déposer des fleurs de jasmin et condamner fermement les auteurs de ce nouveau crime contre la souveraineté du peuple algérien et sa bravoure ancestrale. Le lendemain, quelques lignes passent dans la presse pendant que déjà, le trou est rebouché. Des briques posées à la hâte et une couche de ciment gris rugueux. Bien sûr, quelques jours après, des jeunes ont écrit dessus à la peinture, des mots vulgaires accompagnés de slogans hostiles au pouvoir. Puis le lendemain, l’agence nationale de publicité a collé dessus des affiches électorales. Elles ont été déchirées en quelques heures. Les officiels ont ensuite commandé une fresque à un faux étudiant en beaux-arts, représentant des dromadaires rouges gravissant une colline approximative symbolisant l’espoir d’un monde meilleur à partir de demain. La fresque a été volée dans la semaine.
—Tu sais, s’il n’y avait pas d’étrangers qui achetaient les images, il n’y aurait peut-être jamais d’attentats. C’est une histoire d’argent. Ça n’a rien de politique. C’est du trafic.
—Oui mais c’est trop facile d’accuser à chaque fois les étrangers. Je suis sûr que ce sont des gens d’ici qui volent les images.
—Mais s’il n’y avait pas de marché de l’image, il n’y aurait pas d’images.
—S’il n’y avait pas de preneurs d’images, il n’y aurait pas d’images non plus. Tu pourrais faire ça, toi ? Prendre de pauvres gens comme ça dans la rue. Des innocents ? Pour quelques dollars ?
—Difficile. Il faut vraiment aimer l’argent.
—Ou vraiment détester les pauvres gens.
Il se passe quelque chose. Un mouvement dans la rue, des sirènes de police. Quelques gosses courent pour aller voir. Au bout de cinq minutes, un policier revient de l’endroit où, visiblement, il s’est passé quelque chose. Il est apostrophé :
—C’était quoi ?
—Ce n’est rien, c’était une bombe. On a eu chaud, on croyait qu’ils avaient encore pris une image. Ça aurait vraiment fait trop pour cette semaine.
—Il y a eu des morts ?
—Je ne sais pas. Je n’ai pas bien vu, il y avait trop de fumée.
Le soir même, au 20-heures, la télévision annonçait des mesures. Pour lutter contre le trafic aux frontières. Désormais, pour passer de la drogue, des appareils photo ou des armes, il faudra une autorisation des douanes, signée conjointement par le fournisseur et l’acheteur. Le tout, sous contrôle d’un notaire.
M. et B. sont dans leur appartement, assis en face du poste de télévision. M. joue avec la télécommande. Il demande :
—Tu as pris des images aujourd’hui ?
—Non. Je n’ai pas pu. Ça devient de plus en plus difficile. Dans certains quartiers, les gens accrochent de grandes bâches noires sur les murs. Ça bouffe la lumière. Il faut travailler au flash et ce n’est pas très discret. Ça va devenir très dur pour nous si la population s’implique.
—Si ça ne marche plus, on changera de métier. C’est tout.
—Tu sais faire autre chose, toi ?
—Je sais poser des bombes. J’ai fait un stage il y a deux ans, à Chleff. C’est comme la photo. Juste un déclic.
—On ne gagnera jamais ce qu’on gagne avec nos images.
—Peut-être. On va manger ? J’ai faim.
M. et B. se lèvent et descendent les huit étages. Ils prennent leurs appareils, au cas où. Direction le Trop plein, un restaurant branché du centre-ville. Salutations et petites discussions sur la dernière image avec le patron ; ce sont des habitués. Ils prennent une table au fond, pour avoir une vue d’ensemble. Le dîner est simple et cher mais la musique est bonne. Arrivés au dessert sans encombre, B. se penche vers M. :
—Tu vois la fille voilée, là, dans le coin ? En hidjab. Je l’observe depuis tout à l’heure. Regarde. Elle a fini de manger. Elle allume sa cigarette pendant que l’homme qui est avec elle la tripote sous la table. Le voile, la cigarette et le sexe. C’est le genre de photo qui se vend bien. En plus, il y a un tableau orientaliste en arrière-plan. On tente le coup ?
—C’est risqué. Il y a beaucoup de monde aujourd’hui.
—Ça fait des années qu’on vient dans ce restaurant. Jamais ils ne nous soupçonneront.
—M. réfléchit un moment. Et acquiesce :
—OK. On se la fait. Je te couvre, sors ton appareil. Fais attention au miroir, il ne s’agit pas de mourir nous aussi.
Discrètement, B. sort son appareil de sa poche. Petit réglage pour la lumière. Ça y est, il est prêt. L’appareil est sur la table. M. et B. échangent un dernier regard. Ils ne font plus qu’un. C’est bon. M. se baisse légèrement sur le côté, comme s’il voulait ramasser quelque chose par terre. B. pose le doigt sur la gâchette.
Clic.
Le diaphragme s’est refermé happant matière et lumière. Espace et temps.
Le trou noir.
M. et B. sont dans l’obscurité. Ils flottent dans les ténèbres. Au bout du tunnel, une lumière. Ils sont morts.
*
La panique n’a pas eu lieu. Immédiatement après avoir appuyé sur la détente et pris les deux photographes en photo, l’agent K. s’est levé et a montré ses papiers à tout le monde, en commençant par le patron du restaurant. Sécurité. Les gens contemplent les dégâts, le trou dans le mur, et après quelques commentaires à voix basse sur l’insécurité d’aujourd’hui, se remettent à manger.
—Ça fait des mois que j’essaie de les coincer, ces deux-là. Maintenant c’est fait, dit l’agent K. au patron.
Ce dernier proteste mollement :
—Vous auriez pu les arrêter. Ce n’était pas la peine de faire ça, de les tuer. Ça fait désordre pour mon établissement.
—On n’arrête pas ce genre d’individus. On les renvoie dans l’obscurité. D’où ils viennent.
À côté du patron et de l’agent K., un enfant assis à une table avec ses parents a entendu la conversation. Il dévisage l’agent K. Celui-ci le regarde méchamment :
—Qu’est-ce qu’il y a ? Tu veux une photo ?
—Oui, répond doucement le gamin.
—Regarde celle-ci. Je l’ai prise ce matin. Elle est bonne.
Silencieusement, B. observe l’image un bon moment en tirant sur sa cigarette puis la repose sur la table :
—Tu as raison, elle est bonne. Les trois jeunes qui marchent dans le même sens en file indienne et la vieille femme immobile qui les regarde passer. Le mouvement est éloquent. En plus, avec l’horloge au-dessus des personnages, on dirait un soleil qui illumine la scène. Elle est réussie. Elle en dit long. Toute une histoire.
M. prend la photo :
—Tu vois, là, sur la gauche. Le pied. C’est celui d’un type qui passait. Il gêne un peu. Il faudra peut-être recadrer la photo.
—Peut-être. Mais envoie-la comme ça, ils sauront ce qu’il y a lieu d’en faire. Ce sont eux qui paient.
—Tu as raison. Ce n’est pas mon problème. Ils vont l’acheter de toutes les façons. Avec tout ce qui se passe en Algérie, il n’y a pas beaucoup d’images et ils n’ont pas vraiment le choix. En plus, la photo est bonne.
—B. s’est levé, il est à la fenêtre. Du huitième étage, il domine la ville. Tout en bas, de minuscules passants s’agitent en se marchant sur leurs trajectoires.
—Dis-moi M., dit B. en se retournant brusquement, tu as eu des problèmes pour prendre l’image ?
—Pas vraiment. Dès que je l’ai vue, je j’ai prise et je me suis sauvé en prenant de petites ruelles. Je crois que j’ai été repéré mais c’était déjà trop tard pour eux.
*
Un attroupement dans la rue. Des gens sont agglutinés et, dans la cohue, on entend des cris et des pleurs. La police vient d’arriver, trop tard comme souvent, et tente de disperser les curieux à coups de crosse. Quelqu’un demande :
—Que s’est-il passé ?
Un vieux monsieur, visage triste, explique :
—On a encore pris une image, dit-il en montrant le trou rectangulaire derrière lui. Il y avait une image, là, et ils l’ont prise. C’est la quatrième cette semaine.
—Il y a eu des victimes ?
—Trois jeunes et une vieille sont morts. Un autre a perdu un pied. Il était juste au bord de la photo. Il a eu de la chance.
Une femme est effondrée sur le trottoir. Elle pleure. C’est la mère d’un des trois jeunes, ses mains regardent le ciel :
—Mon fils ! Ils m’ont pris mon fils ! Pourquoi mon Dieu ? Pourquoi mon fils ? Tout ça ne s’arrêtera-t-il jamais ? C’est le deuxième que je perds en un an ! Pourquoi mon Dieu ? Pourquoi moi ? J’ai perdu mon mari pendant la guerre d’indépendance, sommes-nous condamnés à toujours mourir ? Pour accoucher de quoi ?
Des femmes essaient de la calmer. Un homme explique son départ à qui veut l’entendre :
—Il vaut mieux ne pas rester là. Ils sont peut-être encore dans le coin. Ils peuvent en profiter pour prendre une autre image. Ils font souvent ça. La première pour attirer la foule et les forces de l’ordre. La deuxième pour prendre le tout. Ce serait un carnage.
La foule s’est quelque peu dispersée. Deux jeunes concluent vaguement, les mains dans les poches :
—Que fait le pouvoir ? On dirait que ça les arrange.
—C’est le peuple qui paie. Ça ne les inquiète pas. Peut-être même que c’est eux qui font tout ça.
—Ce ne serait pas étonnant. Pays pourri.
L’attentat est clos. En fin d’après-midi, les officiels débarquent sur les lieux pour y déposer des fleurs de jasmin et condamner fermement les auteurs de ce nouveau crime contre la souveraineté du peuple algérien et sa bravoure ancestrale. Le lendemain, quelques lignes passent dans la presse pendant que déjà, le trou est rebouché. Des briques posées à la hâte et une couche de ciment gris rugueux. Bien sûr, quelques jours après, des jeunes ont écrit dessus à la peinture, des mots vulgaires accompagnés de slogans hostiles au pouvoir. Puis le lendemain, l’agence nationale de publicité a collé dessus des affiches électorales. Elles ont été déchirées en quelques heures. Les officiels ont ensuite commandé une fresque à un faux étudiant en beaux-arts, représentant des dromadaires rouges gravissant une colline approximative symbolisant l’espoir d’un monde meilleur à partir de demain. La fresque a été volée dans la semaine.
—Tu sais, s’il n’y avait pas d’étrangers qui achetaient les images, il n’y aurait peut-être jamais d’attentats. C’est une histoire d’argent. Ça n’a rien de politique. C’est du trafic.
—Oui mais c’est trop facile d’accuser à chaque fois les étrangers. Je suis sûr que ce sont des gens d’ici qui volent les images.
—Mais s’il n’y avait pas de marché de l’image, il n’y aurait pas d’images.
—S’il n’y avait pas de preneurs d’images, il n’y aurait pas d’images non plus. Tu pourrais faire ça, toi ? Prendre de pauvres gens comme ça dans la rue. Des innocents ? Pour quelques dollars ?
—Difficile. Il faut vraiment aimer l’argent.
—Ou vraiment détester les pauvres gens.
Il se passe quelque chose. Un mouvement dans la rue, des sirènes de police. Quelques gosses courent pour aller voir. Au bout de cinq minutes, un policier revient de l’endroit où, visiblement, il s’est passé quelque chose. Il est apostrophé :
—C’était quoi ?
—Ce n’est rien, c’était une bombe. On a eu chaud, on croyait qu’ils avaient encore pris une image. Ça aurait vraiment fait trop pour cette semaine.
—Il y a eu des morts ?
—Je ne sais pas. Je n’ai pas bien vu, il y avait trop de fumée.
Le soir même, au 20-heures, la télévision annonçait des mesures. Pour lutter contre le trafic aux frontières. Désormais, pour passer de la drogue, des appareils photo ou des armes, il faudra une autorisation des douanes, signée conjointement par le fournisseur et l’acheteur. Le tout, sous contrôle d’un notaire.
M. et B. sont dans leur appartement, assis en face du poste de télévision. M. joue avec la télécommande. Il demande :
—Tu as pris des images aujourd’hui ?
—Non. Je n’ai pas pu. Ça devient de plus en plus difficile. Dans certains quartiers, les gens accrochent de grandes bâches noires sur les murs. Ça bouffe la lumière. Il faut travailler au flash et ce n’est pas très discret. Ça va devenir très dur pour nous si la population s’implique.
—Si ça ne marche plus, on changera de métier. C’est tout.
—Tu sais faire autre chose, toi ?
—Je sais poser des bombes. J’ai fait un stage il y a deux ans, à Chleff. C’est comme la photo. Juste un déclic.
—On ne gagnera jamais ce qu’on gagne avec nos images.
—Peut-être. On va manger ? J’ai faim.
M. et B. se lèvent et descendent les huit étages. Ils prennent leurs appareils, au cas où. Direction le Trop plein, un restaurant branché du centre-ville. Salutations et petites discussions sur la dernière image avec le patron ; ce sont des habitués. Ils prennent une table au fond, pour avoir une vue d’ensemble. Le dîner est simple et cher mais la musique est bonne. Arrivés au dessert sans encombre, B. se penche vers M. :
—Tu vois la fille voilée, là, dans le coin ? En hidjab. Je l’observe depuis tout à l’heure. Regarde. Elle a fini de manger. Elle allume sa cigarette pendant que l’homme qui est avec elle la tripote sous la table. Le voile, la cigarette et le sexe. C’est le genre de photo qui se vend bien. En plus, il y a un tableau orientaliste en arrière-plan. On tente le coup ?
—C’est risqué. Il y a beaucoup de monde aujourd’hui.
—Ça fait des années qu’on vient dans ce restaurant. Jamais ils ne nous soupçonneront.
—M. réfléchit un moment. Et acquiesce :
—OK. On se la fait. Je te couvre, sors ton appareil. Fais attention au miroir, il ne s’agit pas de mourir nous aussi.
Discrètement, B. sort son appareil de sa poche. Petit réglage pour la lumière. Ça y est, il est prêt. L’appareil est sur la table. M. et B. échangent un dernier regard. Ils ne font plus qu’un. C’est bon. M. se baisse légèrement sur le côté, comme s’il voulait ramasser quelque chose par terre. B. pose le doigt sur la gâchette.
Clic.
Le diaphragme s’est refermé happant matière et lumière. Espace et temps.
Le trou noir.
M. et B. sont dans l’obscurité. Ils flottent dans les ténèbres. Au bout du tunnel, une lumière. Ils sont morts.
*
La panique n’a pas eu lieu. Immédiatement après avoir appuyé sur la détente et pris les deux photographes en photo, l’agent K. s’est levé et a montré ses papiers à tout le monde, en commençant par le patron du restaurant. Sécurité. Les gens contemplent les dégâts, le trou dans le mur, et après quelques commentaires à voix basse sur l’insécurité d’aujourd’hui, se remettent à manger.
—Ça fait des mois que j’essaie de les coincer, ces deux-là. Maintenant c’est fait, dit l’agent K. au patron.
Ce dernier proteste mollement :
—Vous auriez pu les arrêter. Ce n’était pas la peine de faire ça, de les tuer. Ça fait désordre pour mon établissement.
—On n’arrête pas ce genre d’individus. On les renvoie dans l’obscurité. D’où ils viennent.
À côté du patron et de l’agent K., un enfant assis à une table avec ses parents a entendu la conversation. Il dévisage l’agent K. Celui-ci le regarde méchamment :
—Qu’est-ce qu’il y a ? Tu veux une photo ?
—Oui, répond doucement le gamin.